Christine Boisson

Christine BoissonOù se cache donc Christine Boisson ? C’est la question que l’on pose chaque deux ans lorsque cette actrice, déjà rare en temps normal, disparaît complètement de la circulation cinématographique. La principale intéressée, elle, n’en a cure de ces préoccupations ! Elle se terre bien au chaud pendant ses retraites d’hiver, attendant patiemment qu’on lui propose le projet qui l’excitera. L’avis de recherche que nous pourrions lancer serait ainsi libellé : «Wanted : jeune femme née en 1957, comédienne de profession, méfiante et susceptible de nature, écorchée vive à ses heures perdues. Signe particulier : talent. Énorme». Les témoignages abonderont, nombreux. Untel se souviendra d’ «Emmanuelle», le premier film de Christine Boisson où celle-ci incarne l’amie trouble et dénudée de Sylvia Kristel. Un premier malentendu s’établit alors entre Christine et quelques uns qui voient un peu trop hâtivement en elle une fille à rôles sexy et déshabillés. Ce n’est que sept ans après la fantaisie érotique de Just Jaeckin que Christine tournera «Extérieur nuit», un film où elle fait sensation en femme-chauffeur de taxi, partageant ses faveurs entre Gérard Lanvin et André Dus-seller. Elle est si juste dans ce rôle car, après tout, cette Cora douce et violente, forte et fragile, ne lui est pas étrangère. C’est encore un personnage de paumée qu’elle joue dans «Du blues dans la tête», un film dit «marginal» qui ne remporte pas le succès escompté: la déception de Christine est grande et elle parle même de renoncer au cinéma. Heureusement que Antonioni l’engage pour son superbe «Identification d’une femme», nous restituant Christine Boisson telle qu’en elle-même, sidérante, quoi I…

Carole Bouquet

Cocktail pour une diva du 7e art : prenez un soupçon de mauvais caractère et une pincée d’ambition ; ajoutez-y un mélange alliant le cinéma populaire aux films intimistes. N’oubliez pas d’y inclure une large portion de beauté avant de saupoudrer d’une grande cuillerée de talent ; secouez bien le shaker et baptisez le tout «cocktail Carole Bouquet». Les amateurs intéressés trouveront cette rareté au sein de divers menus de choix, disponibles à la demande. Pour le hors-d’œuvre, il nous est conseillé de nous pencher sur «Cet obscur objet du désir» où Mademoiselle Bouquet fait ses débuts sous la houlette de Luis Buñuel. Des premiers pas prestigieux et remarqués malgré un rôle relativement secondaire. Deux ans plus tard, elle constitue brièvement l’apéritif de «Buffet froid» dans lequel elle symbolise.., la mort.French actress Carole Bouquet  arrives for the awards ceremony at the 60th Cannes Film Festival Une composition hors du commun, comme elle en raffole. S’apercevant que le public, ça existe, notre Bouquet adorée en profite pour aller jouer les fleurs plantureuses dans le jardin de James Bond. Dans «Rien que pour vos yeux», elle traverse les multiples péripéties de l’histoire, arborant un air très «faut-pas-croire-mais-ces-galipettes-terminées-je-retourne-à-mes-films-d’auteurs». Elle trouve l’élégance de participer à moult rebondissements spectaculaires tout en paraissant se demander quel sera le clou de la prochaine collection de chez Dior. C’est cela la Bond girl à la sauce Bouquet. La trahison est de courte durée puisque l’actrice retourne vite à ses films difficiles en incarnant une femme internée dans un asile d’aliénés dans «Le jour des idiots» de Werner Schroeter. La cuvée «Carole Bouquet 83/84» ? Formidable.

Fanny Contencon

Fanny a finalement eu son César. Cela pourrait être issu d’un roman de Pagnol et pourtant, c’est tout autre chose dont il s’agit. Replaçons-nous en février dernier, lors de la cérémonie des Césars du cinéma français. Fanny ContenconFanny Contençon vient d’obtenir le prix du meilleur second rôle féminin pour sa composition dans «L’étoile du Nord» ; juste récompense pour une actrice qui, paradoxalement, s’est surtout fait connaître en interprétant des femmes loufoques, gaies et bien dans leur peau. C’est justement de cette étiquette que Fanny veut se débarrasser ; elle sait bien que le public l’adore en partenaire gaffeuse de Francis Perrin, mais elle aimerait qu’on apprécie à sa juste valeur son côté touchant et paumé qui lui colle parfois au cœur. Fanny qui rit, Fanny qui pleure. Fanny en emmerdeuse patentée dans « Tête à claques » puis, le film d’après, en garce intégrale qui en fait voir de toutes les couleurs à sa Signoret de mère dans «L’étoile du Nord». Fanny, épouse dépressive de Dewaere dans «Le paradis pour tous» puis dactylo fofolle et inconsciente dans «Tout le monde peut se tromper». Fanny qui s’évade de son image de blonde acidulée en jouant au théâtre «Le maître et Marguerite», un drame rouge-passion d’après Boulgakov. Ces changements à vue, elle les choisit méticuleusement, consciente du fait qu’on ne nourrit pas éternellement une carrière avec le même plat du jour. C’est cela qui la pousse à accepter indifféremment grands et petits rôles, pourvus qu’ils lui apportent quelque chose. Ainsi, a-t-elle accepté une participation secondaire dans «L’ami de Vincent»face à Philippe Noiret et Jean Rochefort parce que l’histoire lui plaît, tout simplement.

Anne Parillaud

T out au long des années soixante, beaucoup d’hommes (avec Woody Allen à leur tête) rêvaient d’être réincarnés en collant d’Ursula Andress ; aujourd’hui, ils se battraient pour être transformés en un des nombreux pulls de laine d’Anne Parillaud : à juger la façon dont elle les chouchoute à longueur de spots publicitaires, ils seraient ainsi assurés de mener une existence «cachemirdesque» à souhait… !Anne Parillaud Anne Parillaud doit maintenant choisir ses pulls dans la taille «adulte», reléguant aux oubliettes les T.-shirts d’adolescente de ses premières apparitions à l’écran. Que ce soit dans « L’hôtel de la plage » ou «Girls», les films de ses débuts, elle incarne invariablement la minette idéale, draguée par de timides freluquets boutonneux. Des rôles inconsistants qui ne la satisfont pas vraiment. L’année 1979 marque sa première composition dite «sérieuse» dans un téléfilm intitulé «Le temps d’une Miss». Elle se révèle émouvante en fragile provinciale promue au rang de Miss France. Sa participation l’année suivante dans «L’intox» sur les planches et face à Jeanne Moreau achève de convaincre les irréductibles. C’est alors qu’Alain Delon la choisit pour lui donner la réplique dans « Pour la peau d’un flic». Ce film marque une évolution pour Anne Parillaud qui trouve là un rôle à défendre. La métamorphose se poursuit dans «Le battant», toujours sous la férule de Delon. Celui-ci lui offre enfin l’occasion d’incarner une femme de (belle) chair et de sang, avec des répliques spécialement écrites pour elle. La superbe chrysalide est sortie de son cocon et vise désormais les sommets les plus hauts. Rien n’arrêtera son vol au-dessus d’un nid de stars.

Pascale Rocard

Oui, elle est bien la nièce de Michel Rocard. Non, elle ne s’est pas servie de cette parenté pour faire son chemin. Ces précisions données, Pascale Rocard peut enfin parler de ce qui devrait être la première pensée à avoir lorsque l’on cite son nom : sa vocation de comédienne. Elle vous racontera d’abord ses débuts on ne peut plus traditionnels au sein du Conservatoire d’art dramatique de Louveciennes. Sa première pièce qu’elle monte toute seule à seize ans puis ses premières télévisions. A l’heure du thé, Pascale évoquera, amusée, ses débuts à l’écran dans »La frisée aux lardons » et surtout «L’esprit de famille» avec rien moins que Michel Serrault pour partenaire. Elle vous fera bien comprendre néanmoins qu’elle est aux antipodes de ces personnages de joyeuse insouciante qu’on lui fait jouer.Pascale Rocard Pascale Rocard ne jure que par un seul mot : l’émotion. Cette formule prend pour elle les couleurs du rire («Ma femme s’appelle reviens») ou des larmes («L’indic»). Qu’il s’agisse de donner ou de recevoir et notre Rocardette démarre au quart de tour ; elle affirme que c’est cela qui la pousse à accepter ou refuser les rôles qu’on lui propose. Au moment de la quitter, vous ne pourrez pas vous empêcher de vous demander si le perfectionnisme qu’elle affiche ne la poussera pas très bientôt vers la mise en scène. Elle pourrait ainsi se donner, enfin, les beaux rôles qu’on tarde à lui confier aujourd’hui. Sur le chemin du retour, vous serez persuadé que, pour Pascale Rocard, l’ambition est un délicieux petit plat qui se dévore chaud et le plus vite possible.

La saga des prives

Le mois dernier, nous commencions notre dossier sur le film policier par le polar français. Voici la deuxième et dernière partie (le film noir américain) sur un genre qui ne cesse de faire recette et dans le cinéma et dans la vidéo.

Tout comme les hamburgers, il n’est de bon polar qu’américain ! Si, comme nous l’avons vu dans notre précédent numéro, les jeunes réalisateurs français tournent de plus en plus de films policiers, c’est pour une bonne part à cause de la prédominance de la mode rétro qui s’inspire directement des années cinquante. Nous ne jurons que par les impers avachis, les feutres mous, les pubs hyperréalistes, les néons aux couleurs vives et les vieux airs des «big band» de jazz. Question d’ambiance ! Nos années difficiles nous rappellent celles de la Dépression américaine, du temps où Raymond Chandler abandonnait son poste de directeur de compagnie pétrolière pour se consacrer à l’écriture de son premier roman. Avec quelques décennies de retard (mais chez nous c’est une véritable manie !) nous comprenons aujourd’hui l’importance du film policier auprès du public et nous renouons ainsi avec la grande époque du polar américain, quitte, parfois, à la piller ! Mais les classiques qui ont fait de Bogart un véritable mythe resteront toujours ce qu’ils sont. C’est-à-dire inimitables ! Il y a dans ces œuvres l’empreinte de «l’American touch», ce style et ces ambiances bien particulières qui ont donné au polar ses lettres de noblesse. Jamais la comparaison ne pourra tenir entre le pire film d’Howard Hawks (s’il en existe un !) et le meilleur de José Giovanni. C’est comme ça ! Il faut bien l’admettre, comme l’a déclaré Claude Klotz (l’un de nos meilleurs auteurs de romans policiers) : «C’est vrai que les Américains ont inventé le film policier… et même en couleur, leur nuit américaine reste la plus noire de toutes !» Pour sacrifier à un mauvais jeu de mots, il est difficile de faire la lumière sur les origines du film noir. Plusieurs thèses et plusieurs courants se distinguent. Hitchcock qui, entre autres talents, possédait celui d’énoncer des formules définitives, écrivit un jour : «Des hommes et des femmes bavardent en dînant autour d’une table, au bout d’un quart d’heure une bombe explose. L’une des rescapées enquête et explique le drame : c’est du policier ! Des hommes et des femmes bavardent en dînant autour d’une table, mais les spectateurs ont vu l’anarchiste placer et amorcer la bombe : c’est du suspense !» En quelques mots le distingo est fait entre les deux grandes options sur lesquelles se sont bâtis de nombreux films : le policier à l’état pur, du style «Crime de l’Orient Express» et le criminel à suspense comme «Les dix petits nègres» ou «Noblesse oblige». Encore faudrait-il ajouter une subdivision, le film de gangster historique tel que «Bonny and Clyde» ou «Scarface». On le voit, ce genre cinématographique est l’un des plus riches qui soit. Et les cinéastes américains, par leur savoir-faire, ont réussi à le sublimer, à le faire sortir de la série B dans laquelle on l’a trop longtemps enfermé. La nostalgie aidant, les grands moments du cinéma noir ont accès aujourd’hui au rayon des chefs-d’œuvre. Le crime continue de payer ! «Il y a quelque chose de pourri au cœur de notre système». Cette petite phrase du réalisateur Cecil B. de Mille décrit parfaitement le décor dans lequel le film noir prit naissance. Période de crise économique, époque d’entre-deux-guerres et de prohibition, les années vingt étaient des années troubles. C’est dans ce contexte qu’apparurent les premiers polars directement inspirés d’épisodes réels de la guerre des gangs ou de faits divers crapuleux. Le public retrouvait ainsi sur l’écran ses angoisses et ses peurs quotidiennes. Premier en date des films de gangsters «Les nuits de Chicago» de Josef Von Sternberg (1927). Pour de nombreux spécialistes, bien que cette œuvre soit muette, c’est la première du genre. Pour mieux expliquer la réelle influence de son film sur le public, Sternberg racontait qu’une salle le projetant fut contrainte de rester ouverte toute une nuit, les spectateurs n’arrivant pas à s’arracher de son ambiance bien particulière. Autre grand moment de cette période (1930), le film de Howard Hawks, «Scarface». Passé à la postérité grâce à la célèbre balafre arborée par Paul Muni dans le rôle d’Al Capone, « Scarface» est le prototype même du thriller. On y retrouve tous les thèmes qui feront plus tard la gloire du polar : l’amour, le jeu, la vengeance, l’amitié virile. Considérée par certains critiques comme une apologie de la violence ou du racisme, l’œuvre de Hawks est avant tout une implacable machine à suspense. «Je voulais, disait-il, décrire la famille Capone comme s’il s’agissait des Borgia venus à Chicago». C’est également au début des années trente que deux grands héros du polar apparurent : Edward G. Robinson, rendu célèbre pour son apparition dans «Little Caesar» de Mervyn le Roy et James Cagney pour son rôle dans «L’ennemi public» de William Wellman. Ces deux figures furent les premières du genre à s’assurer la fidélité des spectateurs. Deux «gueules» qui ont toujours fait défaut au cinéma français pour obtenir le même succès. A propos de son physique et de son jeu parfois un peu trop appuyé, Edward G. Robinson déclarait : «On m’a si souvent imité et de façon si excessive, que lorsque je dois jouer le genre de personnage qui m’a rendu célèbre, je dois le faire avec exagération si je ne veux pas rester en deca de mes imitateurs». C’est vraiment l’un des principaux attraits que les Américains ont conféré à ce genre de cinéma en typant leurs personnages jusqu’aux limites de la crédibilité. Un flic avait la tête d’un honnête homme et un gangster devait, évidemment, inspirer la peur. Mais ce classement simpliste n’aura pas la vie très longue. L’arrivée d’un nouvel acteur allait tout remettre en question. En 1931, alors qu’il n’a tourné que trois films, Humphrey Bogart incarne déjà un rôle de méchant dans «Bad sister» de Hobart Henley. Sa partenaire est une jeune débutante : Bette Davis. Mais il faudra attendre 1936 et le film de William Keighley, «Guerre au crime» (Bullets or ballots) pour que Bogart incarne son premier grand rôle de gangster face à Edward G. Robinson. Ainsi, pendant vingt ans, Bogie sera l’acteur favori des réalisateurs de polars. A travers sa filmographie, c’est tout le genre qui défile devant nous. Des «Anges aux figures sales» de Michael Curtiz, à «Bas les masques» de Richard Brooks .en passant par «Le faucon maltais», «Le port de l’angoisse», «Le grand sommeil» et l’inévitable «Casablanca», la seule vision de ces œuvres suffirait à écrire toute l’histoire du film policier. Jamais un acteur n’aura autant marqué un genre. Avec sa gueule de solitaire désabusé, sous les traits de Sam Spade ou de Phil Marlowe, il a sur rendre crédible et attachant le personnage du privé jusqu’alors inexploité dans les policiers. Associé tout au long de sa carrière à des partenaires de talent (Laurent Bacall, Peter Lorre, Georges Raft, Ingrid Bergman, Barbara Stanwick, Katherine Hepburn), à des metteurs en scène prestigieux (John Huston, Howard Hawks, Michael Curtiz, Joseph Manckiewicz, Richard Brooks, Nicholas Ray, Raoul Walsh) et à des auteurs de génie (Chandler, Hammett, Hemingway), Bogart donne l’impression d’avoir tout fait, d’avoir exploité tous les contours et détours de ses personnages, ne laissant en héritage à ses confrères que les miettes de son succès. Il serait tout de même injuste de limiter l’influence du polar aux seules prestations de Bogart. S’il fait encore de l’ombre aujourd’hui sur la carrière de nombreux acteurs, la relève est tout de même assurée. Reconnaissons-lui le grand mérite d’avoir rendu mythiques des films, qui, sans sa présence, n’auraient pas connu la renommée dont ils jouissent aujourd’hui. Au rang des autres immortels du genre policier, il convient donc de citer également Glenn Ford «Règlements de comptes», Richard Widmark («Les forbans de la nuit»), Sterling Hayden («Quand la ville dort»), Robert Montgomery («La dame du lac»), Dick Powell («Adieu ma jolie») et Frank Sinatra («Le détective»). Si Bogart fut un acteur d’exception, Alfred Hitchcock mérite la même distinction pour sa carrière de cinéaste. Rarement un réalisateur aura fait preuve d’autant de constance dans l’exploitation d’un genre. Hitchcock est «Monsieur film noir». D’ailleurs André Labarthe l’a parfaitement .décrit : «C’est le seul, dit-il, qui sache chaque fois nous surprendre puis nous tendre un trousseau de clés avant de les reprendre une à une pour nous laisser devant cette évidence : une porte toujours battante au seuil du mystère».Hitchcock Hitchcock. c’est l’éternel recommencement, mais chaque fois on se laisse prendre aux pièges de ses sataniques démonstrations et de son humour. Car il est sans doute le premier à avoir dédramatisé le polar. Aujourd’hui, la vidéo nous permet de revoir quatre œuvres de jeunesse du grand Maître du suspense : «Les trente-neuf marches», «Jeune et innocent», «La maison du Docteur Edwardes», «Les enchaînés»; profitons alors de ce plaisir rare qui nous est donné de frissonner en gardant un sourire crispé au coin des lèvres ! Rendons aussi hommage à Hitchcock d’avoir cédé dans ses films une large place aux rôles féminins. Longtemps effacée ou réduite aux emplois de faire-valoir du superflic ou du super-bandit, la femme est pourtant un élément déterminant dans le paysage du film policier. Sans elle, c’est une part du courant érotique nécessaire à chaque intrigue qui disparaît. Howard Hawks ne s’y était pas trompé en donnant à Lauren Bacall dans « Le port de l’angoisse » un rôle tout aussi fort que celui interprété par Bogart. Le titre, original était d’ailleurs : «To have and have not» (en avoir ou pas)… cela se passe de commentaires ! Pour les nostalgiques de la grande époque du polar, le charme est à présent un peu rompu. L’arrivée de la couleur a fait perdre de son relief au film noir. De plus, le personnage du privé, qui a beaucoup fait pour le renom du genre, a pratiquement disparu. Très en prise avec la réalité de notre époque, le polar des années soixante-dix a surtout fait la part belle aux flics incorruptibles. Seuls des remakes ou des scénarios rétros («Chinatown » de Polansky, «Adieu ma jolie» de Dick Richards, «Bertha Boxcar» de Scorsese) nous permettent de renouer avec la tradition. Loin de partager cet avis, Alain Corneau pose la question : «Quel est le meilleur hommage que l’on puisse rendre au cinéma noir ? Pour moi, ce n’est certainement pas «Chinatown», mais bien plutôt le «Dirty Harry» de Clint Eastwood. Le cinéma d’avant-garde n’est pas là où certains critiques l’imaginent. La modernité, elle est dans «Charley Varrick»… En effet, Eastwood est devenu le héros invincible de ces dernières années. Le privé nonchalant de l’après-guerre qui prenait encore le temps, pendant ses filatures, de lorgner les jeunes filles a été remplacé par des flics au cœur de béton qui soupçonnent chaque femme de dissimuler une arme entre leurs seins. Pas de sentiments chez ces jeunes loups de la gâchette. Le symbole de la prolongation du sexe par le canon du revolver n’est pas seulement une invention de psychiatre. Eastwood, Bronson et de Niro y sont également pour quelque chose ! Aujourd’hui prétexte à des discours politico-sociologiques, le polar américain n’en reste pas moins le plus juste reflet de ce pays bouillonnant. Des films comme «The getaway» de Peckinpah, «Les flics ne dorment pas la nuit» de Richard Fleisher, «Mean Streets» et «Taxi driver» de Scorsese, «Serpico» de Lumet, «Conversation secrète» de Coppola ou «Un justicier dans la ville» de Michael Winner sont de terribles réquisitoires sur la dégradation de la société. Mais n’était-ce pas non plus le cas. de «Scarface», des «Anges aux figures sales» ou du «Facteur sonne toujours deux fois » ? Il ne vous reste plus qu’à enfiler votre imper kaki, à rabattre les bords de votre feutre sur vos yeux, allumer une cigarette blonde, vous servir un scotch et vous caler face à votre télé, avant de vous préparer une belle nuit blanche au pays du film noir. Une fois encore, comme l’a écrit Ryerson Johnson dans la préface de l’un de ses polars, «un gars s’amène vers vous les mains vides. Il n’a pas l’air en rogne, ni rien. Il ne fait pas le plus petit geste de menace. Eh bien, il n’y a rien de pire !» Lazure a la cote. Inconnue au bataillon il y a moins d’un an, la voilà propulsée au rang de convoitise sucrée que plusieurs metteurs en scène s’arrachent. Bientôt, nul ne sera sensé ignorer les péripéties qui ont conduit sur les rives de la Seine cette ex-étudiante en psychologie à Montréal ; on est prié de ne pas oublier l’épisode new-yorkais qui voit Miss Lazure fréquenter le Tout-Manhattan branché plus quelques personnalités appartenant au monde du cinéma. Retour à Paris où elle devient mannequin, histoire de se mettre quelques sous de côté. L’expérience n’est pas des plus concluantes car outre le fait qu’elle n’atteint pas le niveau de top model, notre héroïne, toujours aussi imprévisible, quitte son agence en claquant la porte. A quelque chose caprice est bon puisque ce départ précipité marque les timides débuts de Gaby Lazure sur les écrans français. Après une timide incursion à la télé, elle hérite de petites participations dans deux coproductions internationales tournées dans l’hexagone. Son premier rôle important, elle le trouve dans «Le prix du danger» d’Yves Boisset où elle y est la tendre moitié d’un Gérard Lanvin marathon man de choc. Qu’importe si elle passe les trois quarts du film à pleurnicher, le fait est qu’on la remarque. Elle enchaîne ensuite coup sur coup «La Belle captive» d’Alain Robbe-Grillet et «Sarah» de Maurice Dugowson, deux films au ton radicalement opposé, mais qui la font connaître du public. Miss Lazure en profite pour se lancer à la conquête des médias, affichant sa frimousse et ses pensées profondes à longueur de magazines. Qui donc songerait à se plaindre de l’hégémonie Lazuréenne ?

Manège à trois

Ils peuvent faire bon ménage, les trois standards Secam, Ntsc et Pal. Et offrir ainsi la possibilité de multiplier le rêve par trois. Un téléviseur, un magnétoscope, des vidéocassettes superbes et inimaginables, on vous convie à un petit voyage au pays des multistandards. Et en prime, nous vous offrons une carte des systèmes et normes de télévision dans le monde, encartée dans un cahier de 16 pages, agrémentée d’un glossaire de la vidéo et de bien d’autres renseignements. Mr T, le magnifique et méchant colosse noir à la coiffure da Huron, esquive une droite, se courbe légèrement et décoche à Rocky Balboa un terrible coup au foie, aussitôt suivi d’un uppercut à rendre sourd un rhinocéros. Quelle scène et quel match. Voilà trois fois que ce passage du film «Rocky III (œil du tigre)» défile sur le téléviseur. Non, non, rassurez-vous, ce n’est pas une cassette pirate, mais bel et bien un produit manufacturé, dédouané, légalisé. Un film que tout le monde peut aller, aujourd’hui ou demain, acheter dans les vidéoclubs spécialisés. Importés des Etats-Unis ou d’Angleterre, il en va ainsi pour quelques centaines de titres, de «Mad Max II» à «Creep-show», en passant par «Blade runner», «Cal people», «Y’a-t-il enfin un pilote dans l’avion ?», «Rambo», «Officier et gentleman», «Victor et Victoria», «Halloween III», etc. J’en passe et des meilleurs. Des films qu’on vient à peine de voir sur les écrans. Et que des millions d’Américains (les veinards, ils n’ont pas à subir cette stupide loi du délai d’un an entre la sortie d’un film et sa commercialisation en cassette) peuvent louer ou acheter librement. Mais ici, en France, que faut-il faire, que faut-il avoir, si on est un fou de la vidéo et que l’on veuille aussi bien que n’importe qui, pouvoir accéder à ce catalogue de privilégiés. Tous ces films importés sont destinés aux personnes équipées de magnétoscope et téléviseur capables de lire et/ou d’enregistrer les trois systèmes de couleur existant dans le monde : le Secam (Séquence de couleur avec mémoire) système de télévision couleur normalisé utilisé en France et dans d’autres pays. Le Pal (Phase altération line) adapté par l’Allemagne où il a été mis au point par l’ingénieur Walter Bruch et la société Telefunken. Et enfin, le Ntsc (National télévision-standards commitee) qui couvre essentiellement les Etats-Unis d’Amérique du Nord, le Japon et d’autres pays. Autrement dit, si de retour d’Amérique, vous avez rapporté avec vous une vidéocassette, sachez que pour pouvoir la visionner vous devez avoir un magnétoscope capable de décoder cette cassette dans son système, ainsi qu’un téléviseur conforme à ce système.Manège à trois Par ailleurs, si vous êtes un frontalier d’un pays européen (la France est la seule en Europe de l’Ouest à utiliser son propre système : le Secam) il vous faut pour lire comme pour enregistrer des émissions étrangères, au moins un équipement (magnétoscope-télévision en Pal), avec pour ce dernier un tuner à la norme B ou G si vous habitez près des frontières allemande, italienne ou suisse, et norme I pour enregistrer les émissions du Royaume-Uni. Ces équipements existent en France, ils sont désignés sous le terme, de bi ou tri standards (le mot standard, désigne à la fois la classification des magnétoscopes à cassettes, selon la largeur de la bande utilisée, le système d’enregistrement et les caractéristiques des signaux). Comme on le voit, il n’y a pas plus d’harmonie en la matière qu’il n’y en eut naguère pour tomber d’accord sur un standard commun aux magnétoscopes. Mais contre mauvaise fortune, bon cœur. Demain avec l’arrivée du satellite, on imagine le bonheur de tous ceux qui se sont équipés de multistandards. Excepté les usagers qui vivent près des frontières, semblerait que les adeptes des «multi» se recrutent dans leur majorité parmi les premiers mordus de la vidéo. Et même s’ils ne représentent que quelques pour cent parmi vidéophiles aujourd’hui, leur club a tendance à s’agrandir. Les deux responsables des deux vidéoclubs parisiens spécialisés dans l’importation de vidéocassettes américaines : Marcel Benbassat de Champs Disques (600 titres en Pal et Ntsc) et Pierre Buisson de Lido. Music (1 millier de Pal et Ntsc) affirment d’une même voix, que 50 % de leur clientèle sont des Français. Il est vrai qu’un certain nombre d’entre eux travaillent à l’étranger et sont d’excellents consommateurs vidéo. Quant aux autres, ils appartiennent à peu près à toutes les couches de la société : des acteurs et chanteurs célèbres aux médecins, cadres et employés, l’autre moitié des consommateurs de programmes en Ntsc ou en Pal sont en majorité des Arabes, qu’ils soient du Moyen Orient ou d’Afrique du Nord, ce sont de gros acheteurs de vidéocassettes. Ils préfèrent en général s’approvisionner en France où il semblerait qu’ils aient plus de choix dans les films qu’aux Etats-Unis moins ouverts aux productions (il s’agit de films en l’occurrence) européennes. Contrairement aux idées reçues, le prix d’une cassette importée ne revient pas plus chère_ à la vente que celle d’une autre dupliquée en France. Il arrive même souvent que le même film soit plus élevé pour une vidéocassette «française» qu’une étrangère. Le prix varie de 700 à 1 200, 1 300 francs selon le film. Et cela malgré les différentes charges dont elles sont l’objet (TVA + frais de dédouanement). Quant à la location de ces vidéogrammes, si Pierre Buisson l’exclut comme tout l’ensemble des titres qu’il a à Lido Music, Marcel Benbassat de Champs Disques risque de l’envisager si la conjoncture (des multistandards) le permet. Et là encore, il serait bon de détruire d’autres idées toutes faites. La différence de prix entre un magnétoscope Secam et un tri standard est moins élevée qu’il n’y paraît. Elle se situe selon les modèles de 1 000 à 1 500 francs. Elle est néanmoins plus importante sur les téléviseurs : de l’ordre de 2 000 à 3 000 francs. Que vous désiriez changer votre équipement ou en acheter un neuf, assurez-vous néanmoins que le tuner de votre futur magnétoscope soit bien aussi dans la norme L du Secam : (en plus des normes B, G ou I, selon le pays frontalier). Autrement vous ne pourriez enregistrer les émissions de la TV française. Bien qu’il existe un moyen qui consiste à brancher la prise de péritélévision sur la sortie vidéo d’un téléviseur multistandard dont le tuner serait multinormes. Alors, «Rocky» ou «Mad Max», «Poltergeist» ou « Bladerunner», le royaume des images est là qui vous attend, pour quelques nuits blanches de cauchemars ou de rêves. Sauriez-vous y résister encore longtemps ? Et le voulez-vous vraiment ? Si c’est non, l’entrée est par ici, messieurs dames, pour le club des cinglés de la vidéo.

Ondes de choc sur les prix

Sait-on jamais. Avec un peu de chance, les noms des gagnants du grand concours de la FM seront publiés dans le Journal Officiel avant le 10 mai. Enfin ! Le phénomène des radios libres a explosé depuis maintenant deux ans, à la faveur d’un retournement de veste de l’électorat. Les autorités ont mis beaucoup de temps à le digérer et à le réglementer, sans toutefois le maîtriser. Heureusement, elles n’ont pu ni le contrôler, ni le freiner. Les résultats de la première enquête du Cesp pour 1983 le prouvent. Ils confirment la poussée des radios locales privées, comme on dit. La catégorie qui les réunit avec Sud-Radio et avec toutes les stations FM de Radio France et de RMC obtient 20,9 % en audience cumulée, contre 17,7 % en novembre 1982. Soit plus de 8 millions d’auditeurs. Tous les chiffres (quart d’heure moyen, durée moyenne d’écoute, etc.) concordent. La hausse est très nette. A force de minimiser l’impact de leurs concurrents et de se moquer de leur non-professionnalisme, les vieilles grandes ondes enregistrent une désaffection d’une bonne partie de leurs «chers-z-auditeurs ». Le processus est enclenché. Rien ne l’arrêtera. Même pas l’absence de publicité. C’est un coup bas du gouvernement, mais la pub est paraît-il suspecte. Alors on l’interdit, tout en autorisant les pots de vin. Ne fermons pas les yeux, les stations doivent survivre. Et toutes les ficelles sont bonnes à tirer. Aux Etats-Unis, on retire une licence d’émission pour moins que ça. La récente campagne pour les municipales a positionné ces nouvelles antennes non homologuées légalement comme des médias à part entière. Et ce malgré les cris de « halte à la concurrence sauvage » de certains. Des clubs de la presse et l’association des journalistes sportifs refusent ainsi aux nouveaux le statut de collègues. C’est mesquin. Mais trop tard, les politiciens professionnels n’ont pas ce genre de réticences. Ni aucune morale d’ailleurs. Des cellules régionales ou locales de tous les partis ont offert, à certaines radios, des sommes rondelettes pour faire parole-basse sur leurs informations. prixDans la région de Rouen, les enchères sont montées à 500 000 F. Et en liquide. Des stations ont refusé, quelques-unes non. Municipales toujours, mais cette fois on inverse les rôles. A Montpellier, une station a réclamé 4 000 F à chaque candidat pour le faire bénéficier d’une interview. Pour les frais divers, sans doute. Tricher n’est pas jouer. Mais sans sponsors, il est difficile d’exister et de continuer. Loin des petites magouilles de la politique, les animateurs, qui ne bénéficient pas du soutien d’un parti, d’une municipalité, d’un syndicat, d’une mutuelle, d’un lobby religieux, d’un journal ou même d’un mécène, en sont réduits à frapper à toutes les portes ou à combiner des montages plus ou moins complexes. On prétend dans les couloirs des maisons de disques et dans les allées de la FM que la plus tonique des radios disco parisiennes est payée pour la diffusion de certains disques. Cette forme de dessous de table existe des producteurs l’ont rencontrée. A Paris et en province. Dans la région de Tours, c’est une banque nationalisée qui a offert la belle voiture émettrice qui fait la fierté d’une station. Conséquence, celle-ci a créé une nouvelle émission. Elle s’adresse au monde rural. Inutile de vous préciser la nature des conseils et des propos de la rubrique économique, même si le nom de la banque n’est pas mentionné. Ailleurs des publicités se déguisent avec le costume «infos locales». La méthode n’est pas très crédible, ni discrète, surtout lorsque l’animateur de service toussote systématiquement avant chaque spot, pardon bulletin. Histoire de lancer un clin d’œil sonore, peut-être ? Des messages trop voyants ont placé des candidats à la dérogation comme Radio Vallée de Seine et Béarn n° 1, dans le clan des exclus. Le groupe publicitaire NCK, lui, pratique déjà la prospection pour ses clients par voie de courrier. Quant à l’apéritif Get 27, il organise un grand prix de la radio libre qui porte son nom. Pour y participer, chaque candidat doit diffuser plusieurs fois par heure un indicatif fourni sur cassette. Il annonce évidemment le concours avec une mise en valeur de la marque qui le sponsorise. C’est ingénieux. Pour l’instant la haute autorité ferme les oreilles. Elle ajoute ainsi un peu de confusion à celle qui agite déjà la FM. Il devient difficile de tracer la frontière entre une certaine forme de publicité et un type de mécénat. Toutes ces confusions, toutes ces magouilles n’améliorent pas la qualité des émissions. A Paris, la FM ronronne ou se saborde. L’élan et l’originalité des débuts ont disparu. Le bénévolat a usé les troupes. Cette stagnation devrait se dissiper dès que les mariages obligatoires seront consommés et les programmes parfaitement structurés. Et surtout dès que la situation légale sera enfin éclaircie. C’est la prochaine étape.

Les cordes de la potence

Les cordes de la potenceQui donc est diantrement étonné, en débarquant dans une petite ville de l’Ouest pour arrêter les pilleurs de banque, d’apprendre que son fiston, le petit Dan, a fait le coup avec trois autres voyous ? C’est papa John Wayne, alias Cahill, marshal des États-Unis. A la décharge du gamin, on dira qu’il a été entraîné par de mauvais camarades, rencontrés un soir de cuite dans une cellule de la prison locale. Le méchant, le vrai, c’est le chef des malfrats, George Kennedy. Alors, le père outragé saisit l’occasion de donner une bonne leçon à ses rejetons (le benjamin Billy Joe est aussi dans le coup) et de leur apprendre la morale en les aidants à zigouiller leurs complices. Comme on le voit, le cinéma d’Andrew Mc Laglen ne s’embarrasse pas de nuances. C’est un film d’action, dont l’efficacité ne se relâche pas. Gary Grimes est très convaincant.

Buffalo bill et les indiens

Buffalo bill et les indiensBuffalo Bill est l’un des héros de Western les plus célèbres. Une bonne trentaine de films lui ont été consacrés. Lui même, sous son véritable nom de William Frederick Cody, interpréta trois fois son propre rôle à l’écran. Considéré comme un mythe de la légende de l’Ouest, passant pour l’ami le plus fidèle des Indiens, Buffalo Bill a quelque peu usurpé ses titres de gloire et sa renommée. Ayant débuté comme escorteur de diligence puis comme gardien de troupeaux et agent secret de l’armée du Nord lors de la guerre civile, il termina sa vie comme directeur de cirque, promenant à travers les États-Unis et l’Europe son fameux «Wild West show», une sorte de reconstitution de l’histoire de l’Ouest. C’est ce dernier épisode de l’existence de Buffalo Bill que Robert Altman raconte dans son film. Bien connu pour être un destructeur de mythes (II s’était attaqué au western avec «John Mc Cuba» et au show-business dans « Nashville »), Altman n’y va pas de main morte. C’est un portrait féroce qu’il trace de ce cow-boy d’opérette. Il le décrit comme un arriviste sans scrupules, vaniteux et cupide, incapable d’atteindre une cible à deux mètres, tenant à peine en équilibre sur son cheval et constamment imbibé de whisky. Bien décidé à révéler la véritable personnalité de Buffalo Bill, Altman s’attache à nous montrer combien celui qui passait pour être le protecteur des Indiens n’était en réalité qu’un horrible négrier. En effet, pour donner de l’attrait à son show, Buffalo Bill «achète» à l’armée américaine, le vieux chef Sitting Bull. Encore un mythe qui fout le camps au grand galop !

Le satyricon

Le satyriconA la question de savoir quelles sont les raisons qui ont poussé Fellini à tourner tel ou tel film, celui-ci a pour habitude de répondre: «Parce que j’ai signé un contrat !». Tout comme pour «Roma», «Les clowns», «Amarcord» ou «Casanova», il a attendu qu’un producteur lui suggère l’idée de tourner un film sur l’Italie Antique avant de s’attaquer aux écrits de Pétrone qui sont à la base de cette œuvre. Et sans nul doute, « Le satyricon » est son film le plus ambitieux. Pour nous dépeindre l’Empire romain, il se sert du regard du candide propulsé au premier siècle de notre ère par une infernale machine à remonter le temps. Son voyage relève plus de la science-fiction que de la recherche historique. Utilisant les livres de Pétrone et du fabuliste Apulée comme des guides, Fellini nous promène au gré de l’imagination de ces deux poètes dans une Rome qui n’a rien à voir avec celle dont nous ont parlé nos professeurs de latin. C’est le règne du sexe et de l’argent, de la corruption et du vice à tous les coins de rues. Tout au long du film nous suivons deux jeunes étudiants, Encolpe et Ascilte, qui ressemblent à s’y méprendre à deux marginaux échappés du Quartier Latin. Leur odyssée à travers la ville nous fera croiser des silhouettes familières : des arrivistes, des nouveaux riches, des prostituées, des bandits, des pauvres, des intellectuels soumis aux ordres des dirigeants. Cette société romaine en décomposition, c’est la nôtre. En réinventant l’histoire de son pays, Fellini nous invite à méditer sur le sort qui nous invite à méditer sur le sort qui nous attend. Couvre de. visionnaire. «Le satyricon» souffre peut-être d’une absence de construction dramatique et d’une trop longue durée de projection. Cela dit, que ne pardonnerait-on pas à un chef-d’œuvre?